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Bankerot
Quelle série ! De prime abord, Bankerot (titre si mal restitué en français par Coups de feu en cuisine), histoire de deux vieux copains qui décident d’ouvrir un restaurant gastronomique dans un bâtiment délabré d’une cité de Copenhague, n’est pas du plus grand intérêt. Mais Kim Fupz Aakeson, son concepteur (né en 1958 et auteur par ailleurs d’ouvrages pour la jeunesse), parvient à nous offrir huit épisodes surprenants, autrement dit originaux et touchants, d’une grande qualité esthétique. Les personnages sont tous plus loosers et plus affreux les uns que les autres, l’intrigue est minime, et pourtant, on en redemande. Excellent.
* Kim Fupz Aakeson, Bankerot (2014), Arte (2017)
Death row
Aux États-Unis, Charlotte Cory a été condamnée à mort pour l’assassinat d’un enfant. Ancien avocat, Franck Nitzsche correspond avec elle, jusqu’au jour où elle exprime le désir de le rencontrer. Elle n’a plus que six jours, avant d’être exécutée. Il se persuade qu’elle n’est pas coupable. Signé Bille August (deux fois Palme d’or à Cannes), Death row est un film grand public sur un sujet grave.
* Bille August, Death row (2004)
La Maison aux esprits
Adapté avec beaucoup de liberté du best-seller d’Isabelle Allende, La Maison aux esprits, est une coproduction danoise, allemande et portugaise réalisé par Bille August. Chili, années 1920, jusque 1973. Clara, une femme qui semble posséder des dons de voyance, s’éprend d’un homme ambitieux. Elle l’épouse, ils ont une fille. Mais autant il se montre gentil avec elles, qu’il est un tyran avec les employés de son domaine. Quand il devient sénateur, le Front populaire gagne les élections et l’armée ne tarde pas à renverser le nouveau gouvernement. Soutenus par les USA, les militaires mettent en place une junte impitoyable, même avec lui. C’est le coup d’État de Pinochet. Un peu, beaucoup trop mélo à notre goût ! Ni oubli, ni pardon, pourrait-on dire.
* Bille August, La maison aux esprits (1993)
Les Meilleures intentions
Réalisé par Bille August, ce film est directement tiré du roman autobiographique et éponyme de Ingmar Bergman. Le cinéaste relate la rencontre entre ses parents, son père qui se destine au métier de pasteur et sa mère à celui d’infirmière. Son père qui vient d’un milieu modeste et sa mère de la bourgeoisie. On peut évidemment songer au roman autobiographique de Strindberg, Le Fils de la servante. Les similitudes sont nombreuses, bien que le milieu mis en scène par l’écrivain soit antérieur à celui du cinéaste. Même religiosité, même rigidité de mœurs... Même tentative de dépasser par l’art un destin apparemment figé de manière précoce. Mais Les Meilleures intentions s’arrête à la naissance d’Ingmar, deuxième enfant du couple. Primé à Cannes en 1992, le film, dans cette version DVD, est accompagné des quatre épisodes du feuilleton également réalisé par Bille August. Le feuilleton dure deux fois plus longtemps (plus de cinq heures) et compte diverses scènes qui ne sont que suggérées dans le film. Le jeu des acteurs conquiert le spectateur dès les premières scènes et l’intrigue, certes inscrite dans une époque précise – les toutes premières décennies du XXesiècle – résonne toujours. Les différences de classe et de culture sont-elles moins insurmontables aujourd’hui qu’hier ? Film réaliste, Les Meilleures intentions est un réel chef-d’œuvre, comparable à Pelle le conquérant du même Bille August.
* Bille August, Les Meilleures intentions, 1992, Blaq out (2013)
Bellow the surface
Pays membre de l’OTAN, le Danemark a envoyé des soldats en Afghanistan et l’expérience a été traumatisante. Cette série télévisée, Bellow the surface (saison 1), repose sur le retour de ces combattants. Copenhague, aujourd’hui. La quinzaine de passagers d’une rame de métro sont pris en otage par un commando de trois hommes. Qui sont-ils ? Ils exigent une rançon de quatre millions d’euros pour leur libération. Huit épisodes rondement menés, avec nombre de questions d’ordre philosophiques et politiques, par le biais des preneurs d’otages mais également de ces derniers, sans omettre policiers, politiciens et journalistes.
* Kasper Barfoed, Bellow the surface (saison 1) (2017)
A second chance
Les films de Suzanne Blier ne laissent pas indifférents, tant ils semblent souvent s’inscrire au plus près de nous. Comment classer A second chance ? Un thriller ? Un drame ? Au Danemark, deux policiers, Simon et Andreas, interviennent au domicile d’un couple de drogués, appelés par des voisins. Ils découvrent un bébé laissé sans soins dans un placard. La femme d’Andreas a accouché récemment, mais l’enfant décède mystérieusement. Elle veut garder l’enfant mort et menace, sinon, de se suicider. Le policier décide d’intervertir les deux enfants. Dès lors, les drames s’enchaînent, contre lesquels il ne peut rien. Comme elle sait si bien le faire, Suzanne Blier (née en 1960) dénoue l’imbroglio. C’est alors à peine crédible et pourtant, le spectateur adhère : il n’y a pas d’autre solution acceptable pour tous que celle envisagée, qui conclut le film. Remarquable.
* Suzanne Blier, A second chance (En chance til), Kmbo (2014)
Secten
Avec Secten, Suzanne Blier réussit un film difficile à classer (horreur, anticipation, comédie... ?), agréable à regarder – ne serait-ce que pour la prestation de Sofie Gråbøl. Observé de l’intérieur, le monde des sectes est ici terriblement inquiétant. N’est-ce pas au nom du bien de ses membres que son travail pernicieux s’accomplit ? Même la police ne peut rien faire ! Mona va tenter de retrouver son amie, aux mains d’un couple de gourous. L’ultime réplique vient à point.
* Suzanne Blier, Secten (1997)
Dossier 64
Comme les trois précédents épisodes adaptés de la série Département V de Jussi Adler-Olsen, ce film, Dossier 64, voit les trois principaux acteurs réunis – pour une dernière fois : Johanne Louise Schmidt (Louise), Fares Fares (Assad) et Nikolaj Lie Kaas (Karl Mørk). En effet, Adler-Olsen a signé pour six autres titres avec un autre réalisateur. Dommage, car le trio fonctionnait bien. Dossier 64 plonge dans le passé récent du Danemark, quand des lois promouvant l’eugénisme étaient encore en vigueur. L’intrigue tient la route, comme d’habitude, l’enquête est menée à son rythme, rapide lorsqu’elle a lieu aujourd’hui, et plus lente lorsqu’elle s’intéresse à la période de l’après-guerre. Incontestablement, une bonne série.
* Christoffer Boe, Dossier 64, 2018
Reconstruction
« Un homme entre dans un bar. Il aperçoit une jolie femme. Est-ce qu’ils se connaissent ? Apparemment non. » Ainsi commence Reconstruction, en voix off, film signé Christoffer Boe. Coup de foudre, Alex et Aimée vont s’aimer, mais l’un et l’autre sont déjà impliqués dans une liaison. Le film ne porte pourtant pas sur l’infidélité, ou peu, mais bascule vers l’étrange, voire la science-fiction. Au sortir de la chambre d’hôtel où loge Aimée, Alex n’est plus reconnu par ses proches. Même son père ne sait pas qui il est. Sa compagne (double rôle de Maria Bonnevie !) l’ignore. Un film aux prétentions intellectuelles, assurément, aux très belles images, très travaillées, peut-être un peu long à démarrer, mais dont on ne voudrait pas sortir.
* Christoffer Boe, Reconstruction (2002)
The Substitute/La Remplaçante
Avouons-le : tel que présenté sur la jaquette du DVD, ce film, The Substitute/La Remplaçante, de Ole Bornedal (né en 1959 et réalisateur notamment de Dina), semble être un vrai nanar. Il n’en est rien, il s’agit même d’un très bon film de science-fiction, mâtiné de beaucoup d’humour grinçant. Quand une enseignante venue d’une lointaine planète arrive dans une classe de 5e comme remplaçante, convaincue que les Terriens possèdent un bien ignoré dans son monde : l’amour ! Humour, disions-nous. À ne surtout pas rater.
* Ole Bornedal, The Substitute/La Remplaçante (2007)
Le Veilleur de nuit
Étudiant en droit, Martin accepte un poste de veilleur de nuit à la morgue afin de gagner un peu d’argent. Ce qu’il ne sait pas, c’est que les corps d’un tueur en série qui sévit dans la ville sont amenés là. Et que, peu à peu, c’est lui qui va faire office de suspect principal. Remake d’un film portant le même titre, du même réalisateur, Ole Bornedal (né en 1959), et sorti trois ans plus tôt au Danemark, Le Veilleur de nuit version américaine se laisse vraiment bien regarder. Entre le film policier, le film d’horreur et la comédie...
* Ole Bornedal, Le Veilleur de nuit (1997)
Le Tueur de l’ombre
Une jeune fille est retrouvée assassinée à Copenhague, de nos jours. Puis une autre. La piste d’un tueur en série est rapidement évoquée. Un policier dépressif parce qu’en plein divorce et une profileuse revenue de Londres et reconvertie dans le travail social vont s’allier pour mener l’enquête. Cette série policière danoise, Le Tueur de l'ombre (8 épisodes de trois quarts d'heure chacun) ne dénote pas par son originalité mais elle est bien construite, bien filmée. Surtout, ce qui est intéressant, est le point de vue adopté dès le premier épisode : nous savons qui est le coupable et allons découvrir pourquoi, plus que comment. Certaines scènes sont dures, la souffrance des victimes est exposée. Peut-être est-ce une série que l’on peut qualifier de féministe ? À voir, sans enfants.
* Ina Bruhn/Cartsten Myllerup, Le Tueur de l’ombre (2019), Arte éditions (2020)