M-N

Œil pour œil, croc pour croc

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Ben est un peu gros et pense qu’il est moche. Les autres enfants de sa cage d’escalier se moquent de lui, n’hésitant pas à lui jouer de mauvais tours. « Si j’étais plus beau, ils ne me traiteraient pas comme ça. Ils ne verseraient pas de corn-flakes dans notre boîte aux lettres, ils ne mettraient pas de la boue sur la selle de mon vélo et... » Et ils ne l’auraient pas enfermé dans le local à poubelles. Mais voici qu’un chien nommé Jagger Svensson, qui se tient debout et parle comme tout un chacun, vient le délivrer et l’emmène avec lui. Voici que ce chien lui montre comment réagir. Ne plus se laisser faire, se venger avec un minimum de violence et beaucoup d’humour. Les petites vengeances se succèdent – et c’est le thème du roman. Frida Nilsson (née en 1979) avait déjà publié Ma mère est un gorille (et alors ?), roman dans lequel une fillette orpheline est adoptée, à son grand désarroi, d’abord, par une gorille. Dans ce livre-ci, Œil pour œil, croc pour croc, dans lequel l’humour est présent d’un bout à l’autre, ce sont d’autres préjugés qu’elle affronte. Pas de morale, sinon que les gens (les trois mères des enfants harceleurs) qui en prêchent une feraient mieux de se l’appliquer à eux-mêmes, peut-être se montreraient-ils plus cléments. Drôle et intelligent.

 

* Frida Nilsson, Œil pour œil, croc pour croc(Jagger, jagger, 2013), trad. Ludivine Verbeke, Bayard (Jeunesse), 2016

Trois

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Qui est-on ? Un être à la personnalité clairement cernée ou quelqu’un d’un peu plus complexe, aux identités éventuellement multiples ? La question n’est pas simple et c’est pourtant celle que pose l’auteur suédois Per Nilsson (né en 1954 à Malmö) dans un bel album à destination des très jeunes enfants illustré aux pastels secs et à la gouache par Lisen Adbåge (née en 1982 à Lindköping) : Trois. « Il était une fois trois garçons qui s’appelaient Jonatan. Non, je me trompe. Il n’y a qu’un garçon qui s’appelle Jonatan. » Ce Jonatan qui voit tout en triple est finalement un garçon aussi singulier qu’un autre. Si ce n’est qu’il est âgé de... trois ans, évidemment ! « Et il n’y en a qu’un comme toi, Jonatan ! » Un bel album, plein de finesse.

* Per Nilsson & Lisen Adbåge, Trois (Tre, 2017), trad. du suédois Marianne Ségol-Samoy, L’Étagère du bas, 2023

Faux raccord

Faux raccord

Une histoire d’amour comme une autre, voici ce que conte Per Nilsson dans Faux raccord. Comme une autre, mais lorsque cette histoire d’amour vous tombe dessus, elle acquiert une dimension exceptionnelle. Surtout si vous êtes adolescents et que la jeune fille aperçue dans le bus vous renvoie votre coup d’œil. Tout s’emballe, comment réagir ? Le narrateur de ce roman de Pers Nilsson (né en 1954), Faux raccord, est dépassé par l’événement. Confronté à son premier chagrin d’amour, « il a mal. Mal comme quand un rat vous ronge le cœur de ses dents acérés ». Un roman écrit comme un scénario, efficace.

* Per Nilsson, Faux raccord(Hjärtans fröjd, 1992), trad. Agneta Ségol, Thierry Magnier, 2008

Pettson fait du camping

Pettson fait du camping

Paru en 1992 en Suède, l’album de Sven Nordqvist que publient les éditions Plume de carotte, Pettson fait du camping, était encore inédit en France. Un jour, en fouinant dans le grenier de leur petite maison, Picpus découvre que Pettson possède une tente de camping. À quoi ça sert ? veut-il savoir. Et Pettson d’expliquer, et Picpus de réclamer à passer la nuit sous la tente, plantée dans le jardin. Courte nuit, car il a peur du noir et imagine que l’énorme brochet du lac proche cherche à le dévorer. Mieux vaut donc retourner dans la maison. C’est ainsi que Pettson est découvert par son voisin, Gustavsson, à son réveil sous la tente, et qu’il est contraint d’inventer une version abracadabrante. « Eh bien, quitte à colporter des rumeurs, autant avoir une véritable histoire à raconter. Quand on campe dans le jardin, il n’y a pas grand-chose à dire. » Comme toujours dans les albums de l’auteur-illustrateur Sven Nordqvist, voici une petite histoire originale, tendre et désopilante, loin de ne s’adresser qu’à de jeunes enfants, avec des illustrations qui donnent envie de plonger dedans et de rejoindre illico les deux compagnons.

* Sven Nordqvist, Pettson fait du camping (Pettson tältar, 1992), trad. Catherine Renaud, Plume de carotte, 2020

 

Le Gâteau d’anniversaire

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Si les aventures de Pettson et Picpus ne semblent pas rencontrer un franc succès en France, remarquons tout de même que Le Gâteau d’anniversaire, premier volume de la série, est publié ici pour la troisième fois. Ce qui n’est pas si mal. Et l’on sait que le mot succès, lorsqu’il s’applique à un livre, ne signifie que rarement qualité. Alors n’y allons pas par quatre chemins : les albums de Sven Nordqvist (né en 1946) sont de petits bijoux. Félicitons les éditions Plume de carotte pour cette réédition, une belle initiative. On ne peut que souhaiter trouver enfin l’intégrale de la série Pettson et Picpus, avant, qui sait ? celle de Mamma Mu, ainsi que quelques autres titres d’un auteur qui a sa place aux côtés des plus grands noms de la littérature nordique pour la jeunesse, tant il a su créer un monde qui lui est propre : Astrid Lindgren, Selma Lagerlöf, H. C. Andersen, Tove Jansson, etc. Dans Le Gâteau d’anniversaire, nous faisons connaissance avec Pettson : « C’est depuis ce jour que tout le monde est persuadé que Pettson est fou. Et pourtant, tout cela était logique (…). Ce n’est pas très difficile à comprendre. » Il faut dire que la logique de Pettson est parfois déconcertante. Ainsi, le lecteur découvre combien il peut être compliqué pour Pettson de cuisiner un gâteau d’anniversaire (Picpus fête trois fois dans l’année son anniversaire) lorsque tous les éléments paraissent s’être ligués contre lui : plus de farine, les pneus du vélo à plat, les clés de l’appentis inaccessibles, un taureau féroce à réveiller... Heureusement que Picpus est de bonne volonté et n’hésite pas à rendre service. « Non, décidément, Pettson était loin d’être fou ! »

* Sven Nordqvist, Le Gâteau d’anniversaire(Pannkakstårtan, 1985), trad. Paul Paludis, Plume de carotte, 2018

Le Jour où Picpus a disparu

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En Suède, Picpus se nomme Findus : parce que la voisine de Pettson lui a un jour apporté un chat nouveau-né dans un carton de surgelés de cette marque. Petsson, qui n’est pas du genre à se casser la tête pour des vétilles, a ainsi baptisé le chaton, lequel est devenu aussitôt un compagnon irremplaçable. Pour preuve, son émotion lorsqu’il pense que Picpus a disparu ! Quel malheur ! Il se met aussitôt à retourner la maison, embarrassée d’un tas de choses forcément utiles mais allez savoir à quoi... Pendant ce temps, Picpus, lui, se croit poursuivi par un blaireau et s’est réfugié dans une caisse en bois. Les « snarks », ces petits êtres qui peuplent la maison de Pettson, s’activent pour venir au secours du malheureux chaton. Un très bel album, avec toujours chez Sven Nordqvist cette richesse dans les illustrations : il y a ce que l’œil voit immédiatement et il y a tout le reste, ces innombrables détails que le texte ne mentionne pas et qui donnent envie de reprendre encore les aventures de ces deux personnages si attachants.

* Sven Nordqvist, Le Jour où Picpus a disparu(När Findus var liten och försvann, 2001), trad. Paul Paludis, Plume de carotte, 2018

L’Inoubliable Noël de Pettson et Picpus

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Difficile de classer cet album de Sven Nordqvist, L’Inoubliable Noël de Pettson et Picpus, en jeunesse, tant les adultes prendront plaisir à se plonger dans ses pages. Remarque qui vaut, notons-le, pour l’ensemble de la série. Ici, comme le titre l’indique, les deux compagnons s’apprêtent à fêter Noël. « Depuis deux jours, Pettson et son chat Picpus étaient bloqués chez eux à regarder la neige tomber. Mais, en cette veille de Noël, le temps s’était enfin radouci, et le vieux Pettson avait hâte de sortir faire les courses et de terminer les préparatifs du réveillon. » Hélas, rien ne se passe comme prévu et Pettson se retrouve coincé chez lui, un pied dans le plâtre. Qu’à cela ne tienne, avec le concours des voisins et du système D, son ingénieux chat va se débrouiller pour fêter dignement Noël. « ...La cuisine entière ne fut plus que rires, bavardages et échanges de vœux. » Jamais niaise, cette série, qui au contraire déborde de sensibilité et d’intelligence. Quant aux illustrations... Un régal.

 

* Sven Nordqvist, L’Inoubliable Noël de Pettson et Picpus(Pettson far julbesok, 1988), trad. Philippe Couderc, Plume de carotte, 2018

 

Pettson piège le renard

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Sans doute est-ce l’un des meilleurs albums de la série des Pettson-Picpus, que celui-ci, Pettson piège le renard. Toute l’ingéniosité des deux compères s’exerce non contre le renard censé voler les poules, bien mal en point et capable tout au plus de dérober un gâteau au chocolat offert sur un plateau par le si sympathique Pettson, mais contre le voisin, Gustavsson, qui accable le renard afin d’écarter les soupçons de sa personne. Quand Pettson et Picpus ridiculisent un chasseur menteur et peureux, ce sont toutes les petites bêtes qui vivent près d’eux qui se félicitent... !

 

* Sven Nordqvist, Pettson piège le renard (Ravjakten, 1986), trad. Paul Paludis, Plume de carotte, 2018

 

Grabuge au potager !

Nous ne féliciterons jamais assez les très bonnes éditions Plume de Carotte (engagées par ailleurs dans un travail écolo-littéraire) de republier les « Aventures de Pettson et Picpus ». Sven Nordqvist signe là une excellente série tant à destination de la jeunesse que des adultes. On retrouve dans ce volume, Grabuge au potager !, les deux compères. Picpus plante une boulette de viande dans la terre, à l’instar de Pettson avec ses légumes, et attend qu’elle pousse. « Toutes les deux minutes, il venait voir si quelque chose avait poussé. » Les ingrédients des volumes précédents sont là : une certaine absurdité non dénuée de logique est à l’œuvre, dans un décor à la fois très réaliste (accumulation de détails) et fantastique (présence de multiples « snarkes »). À lire et à relire.

 

* Sven Nordqvist, Grabuge au potager ! (Kackel i gronsakslandet, 2012), trad. Camille Gautier, Plume de Carotte, 2019

Le Roi de la basse-cour

Le Roi de la basse-cour est l’un des premiers titres de la série des Pettson-Picpus. « Le vieux Pettson vivait dans une petite ferme. Il y avait là un jardin, un atelier, un appentis à bois et un poulailler où vivaient dix poules. Dix poules que son chat Picpus s’amusait à taquiner quand il n’avait rien d’autre à faire. (…) Elles étaient ses meilleures amies... après Pettson, évidemment ! » Quand Pettson décide de lâcher dans cette basse-cour un coq, qui sinon aurait fini « au vin » chez le voisin Gustave, Picpus est fâché. Les cocoricos de l’animal lui tapent sur les nerfs. « C’est injuste ! (…) Lui, il peut hurler tant qu’il veut, et moi, je n’ai même pas le droit de chanter... » Picpus s’ingénie alors à persuader le coq de recouvrer sa liberté. D’accord, mais en contrepartie, lui dit Pettson, toujours si conciliant, c’est toi qui t’occuperas des poussins à naître. « Le visage de Picpus s’illumina. Il se jura que, s’il le fallait, il resterait jour et nuit à veiller auprès du poulailler. » S’il convenait de ne retenir qu’un titre de la série Pettson-Picpus, le choix serait difficile : intelligence des textes et beauté des illustrations sont ici au rendez-vous.

 

* Sven Nordqvist, Le Roi de la basse-cour (Tuppens minut, 1996), trad. Paul Paludis, Plume de carotte, 2019

Une Année d’activités nature avec Picpus

Picpus est un chat très ingénieux. Les lecteurs de ses aventures avec Pettson le savent déjà mais dans ce volume, Une Année d’activités nature avec Picpus, ils en ont confirmation mois après mois. Car de janvier à décembre, il y a mille choses à faire dans le jardin ou la maison, et toutes prouvent combien le lien avec la nature est indispensable. « À partir de 4 ans », ce livre, comme indiqué sur la couverture ? Oui, mais sans limite d’âge, comme les albums qui mettent en scène les deux compères, débordant toujours d’humour et de remarques finaudes. « Comment recycler un sapin de Noël ? » Fabrique « un fouet à porridge », construis une « maison en bâtonnets d’esquimaux », récolte des « fruits sauvages », des noisettes, des champignons, « cueillette de baies d’églantier », « rondelles de pommes séchées », etc. Ou comment réutiliser ce qui aurait pu aller bêtement à la poubelle, explique ainsi Picpus, jamais en panne d’idées originales, voire farfelues. Une sorte de Manuel de Géo Trouvetout revisité, ce livre. Un excellent cadeau à faire.

 

* Sven Nordqvist/Eva-Lena Larsson/Kennert Danielsson, Une Année d’activités nature avec Picpus (Pyssla med Findus, 1998), trad. Catherine Renaud, Plume de carotte, 2019

 

Picpus déménage

Quel régal, cette série signée Sven Nordqvist, Les Aventures de Pettson ! Voici un nouveau titre : Picpus déménage. Le torchon brûle entre le petit chat et son maître. Rien de bien grave, mais un peu plus d’indépendance ne serait pas pour effrayer Picpus. Croit-il. S’il déménageait, il pourrait sauter dans son lit à cinq heures du matin, sans empêcher Pettson de faire la grasse matinée. Bien nettoyées, bien aménagées, « les anciennes toilettes, sur la colline, pourraient faire l’affaire », propose Pettson. D’accord, dit Picpus. Mais comme ils se sentent seuls, l’un sans l’autre ! S’il promet de ne pas sauter avant sept heures, Picpus ne pourrait-il pas revenir dormir dans la maison de Pettson ? Comme toujours, chaque illustration regorge de détails, qu’une première lecture ne permet pas de discerner. Lire et relire ces volumes est donc conseillé. Un seul reproche à adresser aux éditions Plume de carotte : pourquoi mentionner dans leur catalogue que Les Aventures de Pettson s’adressent aux enfants de six ans ? Les plus grands et les adultes peuvent assurément y trouver leur compte. Nous, on adore.

 

* Sven Nordqvist, Picpus déménage (Findus flyttar ut, 2012), trad. Camille Gautier, Plume de carotte, 2019

Pauvre Pettson

Les éditions Plume de carotte poursuivent leurs rééditions des volumes de Pettson/Picpus de Sven Nordqvist avec ce volume, Pauvre Pettson. Quelle belle initiative ! Ici, Pettson déprime. Il ne sait trop pourquoi, mais en ce jour d’automne, son humeur est comme le temps : maussade. « Il faut couper du bois et je n’en ai pas envie. Il faut retourner le champ de patates et je n’en ai pas envie. Tout ce que j’ai envie de faire, c’est de rester assis ici et de m’apitoyer sur moi-même. » Picpus se démène pourtant pour lui apporter de la joie, mais rien à faire. Jusqu’au moment où... N’en disons pas plus, mais soulignons encore une fois la beauté des illustrations, dans lesquelles le lecteur, petit ou grand, ne peut qu’avoir envie de plonger. Voir, par exemple, l’une des dernières du volume, sur une double page : Pettson et Picpus en train de pêcher dans leur barque, au milieu d’un lac entouré d’une forêt aux couleurs de  l’automne. Quasiment une toile impressionniste.

 

* Sven Nordqvist, Pauvre Pettson (Stackars Pettson, 1987), trad. Barbara Kühne, Plume de carotte, 2019