Essais
Les Norvégiens pacifistes
Henry Daugier, qui avait naguère créé les éditions Autrement, a lancé, sous l’égide des Ateliers HD, une collection intitulée « Lignes de vie d’un peuple », dans laquelle prend place ce titre de Vibeke Knoop Rachline, Les Norvégiens pacifistes. Bonne idée, que d’entrecroiser ainsi les points de vue, pour présenter un pays situé « à la périphérie du continent européen ». Dans ce volume, on retrouve les voix de Gro Harlem Brundtland, ex-première femme Premier ministre (1986), de Shabana Rehman Gaarder, comédienne et humoriste née au Pakistan, de la Franco-Norvégienne Eva Joly, députée européenne d’EELV, ou d’écrivains comme Knut Faldbakken, reconverti avec bonheur dans les romans policiers, Anne Holt, ex-ministre de la Justice et auteure elle aussi de romans policiers séduisants, Jon Michelet, auteur communiste de polars militants et traduit en français depuis 2011 seulement, Monica Kristensen Solås dont les romans prennent l’archipel du Svalbard pour cadre... Ce livre présente l’intérêt de nous ouvrir les porte de la Norvège d’aujourd’hui, largement cosmopolite, sans faire l’impasse sur son passé (Grieg, Ibsen…). Pays riche, grâce au pétrole de la Mer du Nord, et en pleine mutation, la Norvège ne cesse, en dépit de l’alternance politique, de brandir certaines valeurs : l’égalitarisme, bien entendu, le partage, le sens de l’effort collectif, l’entraide et la courtoisie, sans oublier l’amour de la nature. De fait, les critiques que le pays rencontre laisse coi : « …La Norvège du XXIe siècle serait trop parfaite : un modèle envié de beauté, d’égalité et de charité éclairée. » N’avait-on pas parlé de « nouveau totalitarisme », dans les années 1970, pour désigner la Suède, où régnait alors une social-démocratie relativement vertueuse ? S’il n’existe pas de pays idéal sur cette planète, il est sans doute plus agréable de vivre dans certains – et sans détours, parlons ici des pays nordiques – que dans d’autres, ne serait-ce qu’en raison de la tolérance et de l’égalité qui les caractérisent, ce que ce livre souligne bien.
Quelques remarques, cependant :
- Puisque le livre où figure la fameuse « loi de Jante » (qui sert de socle tacite à la façon de vivre des Norvégiens et autres Nordiques) est cité, il aurait été bon, n’est-ce pas, qu’il le soit sous son titre français (Axel Sandemose, Un Fugitif recoupe ses traces, trad. Alex Fouillet, Presses universitaires de Caen, 2014).
- Knut Hamsun ne s’est pas converti au nazisme « à la fin de sa vie » mais vingt ans auparavant.
- « …Pendant l’occupation allemande lors de la Seconde Guerre mondiale, les nazis ont ménagé la Norvège », écrit Vibeke Knoop Rachline ! C’est faire peu de cas de la répression cruelle qui a frappé une population très majoritairement hostile au nazisme (songeons notamment aux pasteurs et aux enseignants). Propos à mettre en parallèle, par exemple, avec le livre de Kjartan Fløgstad, Des hommes ordinaires (Stock, 2012), parmi pas mal d’autres consacrés à cette période, en ce pays.
- Le montant, aujourd’hui, du Fonds pétrolier, que le gouvernement destine aux générations futures ? Il varie d’un chapitre à l’autre : 600 milliards d’euros ? 756 ?
- Quant à Jean-Paul Sartre, qui, apprenons-nous ici, emprunta avec ses parents le Hurtigruten, l’express côtier, dans les années 1930, il n’aurait peut-être pas été inutile d’indiquer que, chose assez inattendue, l’écrivain rédigea la préface (plutôt insipide) du guide Nagel consacré à la Norvège en 1976.
- Et puis... pourquoi aucune mention de Gunnar Staalesen, pourtant pas tout à fait un inconnu et sûrement pas le moins intéressant des auteurs de romans policiers ?
La Frontière
« Il en est ainsi, aujourd’hui : si on a assez d’argent, on peut partir en croisière pour le pôle Nord, manger du caviar, boire du champagne et prendre des égoportraits dans le désert de glace avant de remonter à bord du brise-glace et de s’accorder un verre au bar pour fêter son exploit. » Passionnant. Il n’y a pas d’autre mot : ce livre, La Frontière, de la Norvégienne Erika Fatland, est passionnant. L’anthropologue avait déjà emmené ses lecteurs en Asie centrale dans son précédent ouvrage, Sovietistan (Gaïa, 2016). Elle entreprend ici de relater son voyage de plus de vingt mille kilomètres le long de la frontière russe. Petite réserve : comment ne pas être sceptique quand elle affirme que « dans la frénésie des années 1990 », en Russie, « les groupes anarchistes et criminels sévissaient » : sûrement pas « anarchistes » au sens politique. Passionnant, donc, et attristant, quand elle nous parle des méfaits que l’homme commet et a commis de tout temps contre l’environnement – autrement dit la nature, faune et flore, et les autres hommes. La pollution se rencontre jusque dans des lieux a priori désertiques. « Je ne m’attendais pas à autant de déchets. Je n’ai jamais vu autant de barils d’essence rouillés que dans l’Arctique, des milliers et des milliers de vieux bidons empilés ou jetés çà et là dans la toundra : un rappel tangible des ambitions soviétiques dans les régions septentrionales. » Quant aux effets du réchauffement climatique, il se font sentir ici deux fois plus que dans le reste du monde et seront désastreux. Le voyage commence en fait en Corée du Nord, « pire dictature du monde », et continue en Chine. À chaque étape, et elles sont nombreuses (Chine, Mongolie, Kazakhstan, Azerbaïdjan, Ukraine, Biélorussie, Lituanie, Pologne, Lettonie, Estonie, Finlande, etc., et enfin Norvège), Erika Fatland se lance dans une rapide et concise mise en perspective historique, géographique, économique, sociale et culturelle. Il s’agit ici d’anti-tourisme : l’auteure (née en 1983) ne se déplace pas pour consommer ou se prélasser, mais pour comprendre. Pour observer la nature, mais aussi pour saisir les rivalités ou les complémentarités entre États, autrement dit entre groupes humains. « Les nations n’ont pas de mémoire ; les nations n’ont pas de plaies qui se referment, les nations n’ont pas de cicatrices. Les cicatrices sont portées par les individus, un ici, un là, un autre, et encore un... des millions. » La Russie – son passé, son présent et son avenir – est au centre de ce voyage (attention, p. 566, à respecter le rythme du temps : 132 ans, ce n’est pas « bien deux siècles »). Sous-titré « Un voyage autour de la Russie, de la Corée du Nord à la Norvège » (le sous-titre norvégien est beaucoup plus long : « En reise rundt Russland gjennom Nord-Korea, Kina, Mongolia, Kasakhstan, Aserbajdsjan, Georgia, Ukraina, Hviterussland, Litauen, Polen, Latvia, Estland, Finland og Norge samt Nordøstpassasjen » !), ce livre n’est pas un simple récit de voyage, loin de là, bien trop informé, bien trop savant, ni un traité de géopolitique ou géostratégique, bien trop emprunt de considérations personnelles, ni... Mais il est tout cela à la fois, une véritable somme de connaissances, et le voyage, une fois entamé, se poursuit jusqu’à son terme pour le plus grand intérêt du lecteur. Magistral, en un mot.
* Erika Fatland, La Frontière (Grensen, 2017), trad. Alex Fouillet, Gaïa, 2019
Ma vie ressemble à la vôtre
« J’habite dans la ville qui m’a vu grandir. Je suis diplômé de l’université, fils de deux diplômés de l’université. Ma vie ressemble à la vôtre. Je suis marié, ma femme s’appelle Ida, et elle est écrivaine. » Le narrateur de ce récit de Jan Grue (né à Oslo en 1981, écrivain et acteur), qui n’est autre que l’auteur lui-même, se présente ainsi. « Ma vie ressemble à la vôtre », soutient-il, sauf qu’il est atteint d’une maladie neuromusculaire rare et que, depuis que sa maladie a été diagnostiquée alors qu’il n’était encore qu’un jeune enfant, il se déplace en fauteuil roulant. « ...N’y a-t-il rien de plus essentiel pour le récit de ma vie que le corps avec lequel je traverse l’existence ? » Du coup, bien des choses sont différentes et se révèlent vite difficiles, que ce soit dans sa vie quotidienne ou pour des projets à plus ou moins long terme. « Le monde devient autre à partir du moment où l’on adopte un certain regard, où l’on fait attention. Quand on raconte une histoire secrète qui concerne soi-même, on reconquiert le monde. » Jan Grue cite Michel Foucault et quelques autres auteurs qui se sont interrogés sur les limites de la liberté de l’être humain. Il s’avoue souvent tributaire de ses proches, parents et amis, pour les moindres « besoins spécifiques » de la vie quotidienne. « Quand je veux quelque chose, je suis obligé de me battre. » Mais se battre ne suffit pas toujours face à des individus malveillants ou qui s’en fichent... Ses exemples de voyage en avion sont affligeants. Ma vie ressemble à la vôtre est un texte fort, émouvant, qui donne à comprendre une situation qui n’est pas exceptionnelle.
* Jan Grue, Ma vie ressemble à la vôtre (Jeg lever et liv som ligner deres, 2018), trad. du norvégien Marina Heide, Le Bruit du monde, 2023
Quelques grammes de silence
Excellente idée, que de tenter de faire l’apologie du silence. Alors que vitesse et bruit se conjuguent sans cesse, au nom d’une soi-disant spontanéité décervelante, le silence demeure à coup sûr une valeur refuge pour notre santé mentale – voire notre santé, tout court. Né en 1963, explorateur (le premier à avoir atteint le pôle Nord, le pôle Sud et le sommet de l’Everest, autrement dit le « challenge des trois pôles »), collectionneur d’art, Erling Kagge se lance ici dans un projet sympathique. Mais pourquoi tant de gaucherie ? Car au lieu de nous entraîner dans les méandres d’un silence non pas bruyant mais bruissant, comme il peut l’être dans la forêt ou sur une plage, sur un sommet de montagne ou encore chez soi, parfois, Erling Kagge bavarde et bavarde encore, au point de donner au lecteur la très forte envie de le déguster enfin, ce silence promis, mais sans lui : en refermant le livre bien avant la dernière page. Le silence, il nous en parle comme des touristes de retour de tel ou tel endroit du monde vont nous expliquer les us et coutumes des sauvages qui vivent là : de haut, de loin, avec autant de bienveillance que possible, mais en ayant pris soin de rester sur le seuil des habitations – on ne sait jamais, n’est-ce pas ? « …Je pense que vous pourriez faire l’expérience du silence en vous asseyant près de l’Escalator de l’aéroport de Gardermoen, du moment que vous avez assez de volonté. » Tel que présenté par notre auteur, le silence semble terriblement compliqué à atteindre. Bien sûr, en Norvège, il est moins rare qu’ailleurs, la nature l’accueille, la nature le préserve encore, mais Erling Kagge multiplie les exemples de moments de silence (ou ce qu’il désigne ainsi) trouvés à l’autre bout de la planète, à l’issue de voyages en avion (peu coûteux ? peu fatigants ? peu polluants ? peu bruyants ?) et ne manque pas, puisque son essai entend flirter avec la philosophie, de nous rappeler quelques vérités : « Le silence en lui-même est une démarche enrichissante » (merci de le souligner mais sinon, pourquoi un livre à son sujet ? peut s’interroger le lecteur) ; « C’est une qualité, quelque chose de rare et de luxueux » (puisque comparé tout au long du livre à des produits de marque !) ; « Une clé qui peut ouvrir la porte à de nouveaux modes de pensée » (ce n’est sans doute pas faux, mais pas une découverte non plus, des individus en retrait de leur société et en quête de spiritualité, religieuse ou non, cela ne date pas d’hier). Partant d’une bonne idée, Erling Kagge s’inscrit dans l’air du temps, ni plus ni moins, amassant les poncifs : « …Le silence nous permet, en faisant une pause, de retrouver des plaisirs simples » ou « Je trouve (…) que la vie nous réserve plus de surprises quand nous laissons libre cours à nos sentiments », etc. 140 pages à l’avenant, avant l’inévitable liste de références et de remerciements ! Erling Kagge essaie de nous vendre ici le succédané d’un bien indispensable et gratuit, le silence, comme d’autres nous vantent le hygge en guise et place de la sobriété et de la simplicité volontaire. Entourloupes marchandes, non ?
* Erling Kagge, Quelques grammes de silence (Stillhet i støyens tid, 2016), trad. Hélène Hervieu, Flammarion, 2017
Et si je devenais dictateur
« Un dictateur vit dangereusement. Car il exerce un métier qui attise beaucoup d’envies et lui attire de nombreux ennemis. » Le pouvoir absolu est un jeu très sérieux, comme le démontre Mikal Hem dans Et si je devenais dictateur, s’inspirant de quelques exemples contemporains plus ou moins célèbres. Le métier ne s’improvise pas. Ou bien, c’est aux risques et périls du prétendant. Le pouvoir démocratique est moins dangereux mais, d’un point de vue strictement vénal, n’offre pas les mêmes avantages. Mikal Hem entend livrer ici un guide ou quasiment. « De nombreux chemins mènent au pouvoir. Le plus important pour vous reste à déterminer la méthode la plus adaptée afin de devenir souverain absolu du pays que vous comptez diriger. (…) Prendre le pouvoir est (presque) un jeu d’enfant. Rester au sommet se révèle nettement plus compliqué. » Sa liste de dictateurs est impressionnante. Si les pays d’Afrique, d’Amérique du sud ou d’Asie sont les principaux pourvoyeurs de tyrans de toutes obédiences, l’ensemble de la planète fournit son personnel : la Biélorussie, la Russie ou, il n’y a pas si longtemps, le sud de l’Europe… Songeons encore à la Turquie, en très bonne voie. Seules les démocraties anciennes semblent relativement à l’abri, bien qu’aujourd’hui nombre d’entre elles soient menacées par le populisme de droite. Et si je devenais dictateur est un essai. Les informations de ce livre sont pour la plupart déjà connues. Elles n’en donnent pas moins le frisson, tant l’imagination des despotes est sans limite. Elles peuvent prêter à sourire (les 100% de voix en sa faveur, lors d’un référendum, de Sadam Hussein ; ou le monarque Abdelaziz, en Arabie saoudite, qui a enfanté cinquante-trois garçons et trente-six filles… !) Comment de tels comportements sont-ils possibles ? peut-on se demander. Comment peut-on se moquer du monde à ce point ? Et comment peut-on continuer d’honorer ce type de personnages ?... (Ah ! les visites d’État de Donald Trump et de Vladimir Poutine en France ! et la candidature Marine Le Pen à l’élection présidentielle… !) Les raisons sont d’abord financières, évidemment. Au-delà de l’ironie nécessaire et bienvenue, ce livre doit nous inciter à faire preuve de vigilance. Car, des dictateurs, nul pays ne saurait s’en prétendre définitivement épargné, surtout pas la France, qui a toujours été une « terre d’accueil » pour nombre d’entre eux.
* Mikal Hem, Et si je devenais dictateur (Kanskje jeg kan bli diktator, 2012), trad. Jean-Baptiste Coursaud, Gaïa, 2017
La Force qui nous manque
« Jusqu’à 50 ans, j’ai tenu pour sûres la grandeur et la noblesse des institutions (…). La France m’a dégrisée, dévoilé l’envers du décor. L’instruction fit mon instruction. » Ainsi parle Eva Joly dans son ouvrage autobiographique, La Force qui nous manque, dans lequel elle évoque rétrospectivement son métier de magistrate, en France, chargée de dossiers sulfureux. Arrivée de Norvège dans la capitale française comme jeune fille au pair, elle exerce différents emplois avant de se retrouver magistrate au parquet de Paris. Avec une certaine idée de l’honnêteté et de la droiture, qui se heurte aux pratiques des grands chefs d’entreprises ou des responsables politiques, lesquels pensent souvent ne pas avoir de comptes à rendre à leurs concitoyens. « Que faire de toute cette période, de ces années (…) ? ...Elles encombrent mes souvenirs, elles y ont déposé le mensonge, l’impuissance, le non-dit, le regret... toute chose qu’on ne classe jamais définitivement, même si les dossiers furent juridiquement bouclés et menés à leur terme. »
* Eva Joly, La Force qui nous manque(en collaboration avec Judith Perrignon), Les Arênes, 2007
« La France (…) a longtemps courtisé le rêve social-démocrate, elle n’y est jamais parvenue. Ce rêve est contraire à sa structure mentale et féodale. Ce pays ne s’est jamais défait de sa tradition latine du village qui se tient à l’ombre du château, offrant sa confiance en échange d’une protection. Il ne rêve que de grandeur. Il s’amuse et se lasse vite des scandales qu’on y déterre, car il aime trop la toute-puissance pour lui interdire ses caprices et ses écarts. Il finit toujours par pardonner. Les hommes politiques les plus véreux y connaissent une longévité rare. » (Eva Joly, La Force qui nous manque)
Pas à pas
Quelle partie de fou rire avec le précédent ouvrage traduit en français de Erling Kagge, Quelques grammes de silence, dans lequel l’auteur se plaisait à, comme on dit, enfiler les perles. Voici qu’il récidive aujourd’hui avec cet essai, Pas à pas, heureusement plus intéressant. « Erling Kagge, aventurier des temps modernes, choisit de prendre le temps dans une société où tout doit aller vite », annonce la quatrième de couverture. À grand renfort d’exemples tirés de sa propre vie et de citations de philosophes (dont son ami l’écologiste Arne Næss), Erling Kagge explique ainsi combien il est important pour l’être humain de mettre un pied devant l’autre (la position verticale ne correspond-elle pas aux débuts de l’humanité en tant que telle ?). Combien il est important de prendre son temps. « Parfois, marcher signifie entreprendre un petit voyage d’exploration intérieure, puisque les bâtiments, les visages, les signes, le temps qu’il fait et l’atmosphère de la rue vous façonnent. (…) Marcher est un mélange de mouvement, d’humilité, d’équilibre, de curiosité, d’odeurs, de sons, de lumière et – si vous allez suffisamment loin – de nostalgie. » Nous ne saurions contester cet avis (fort à la mode en cette époque vouée au « développement personnel », cinquante ans après les actions collectives de 68...), mais, pour l’appuyer, Erling Kagge est-il obligé d’aligner autant de banalités et de pléonasmes ? Par exemple : « Trois kilomètres séparent mon domicile du bureau ; à vrai dire, c’est un peu trop court, mais c’est toujours mieux que cinq cents mètres » ; ou « les vêtements sont des marqueurs sociaux »... Quelle découverte ! Et Erling Kagge (sur les pas de son compatriote Tomas Espedal et de son essai intitulé Marcher) de nous recenser, après avoir fait l’apologie d’un luxueux silence dans son précédent livre, les bienfaits d’un acte aussi élémentaire que la marche – de préférence dans des lieux où, pour se rendre, il faut au préalable emprunter l’avion. Proposons à Monsieur Kagge la publication d’un troisième volume consacré à la respiration. Ne se porte-t-on pas mieux lorsque l’on respire ?
* Erling Kagge, Pas à pas (Å gå. Ett skritt av gangen, 2018), trad. Hélène Hervieu, Flammarion, 2018
Vers l’écologie profonde
« Le fait de se sentir extrêmement petit au regard des dimensions du cosmos permet de s’ouvrir et de s’approfondir soi-même, et l’on accepte alors avec enthousiasme ce que les autres prennent pour une corvée : prendre soin de la planète. Prendre soin de la planète devient une source de joie et non plus seulement quelque chose qu’on fait pour survivre. » Il est facile aujourd’hui, à l’heure des réseaux sociaux, de « dézinguer » un artiste, un philosophe, un politicien ou n’importe quel autre quidam en quelques clics. Une grosse insulte ou une formule bien envoyée et c’en est terminé, au moins momentanément, des beaux jours du dit personnage. Arne Næss n’a pas exactement subi pareilles foudres, mais que de fois n’a-t-on pu lire que, de par ses outrances, ce précurseur de l’écologie et théoricien de la « deep ecology » ne méritait pas d’être pris en considération. Purement et simplement. Pour un mot mal compris ou une idée mal acceptée, un esprit brillant comme le sien est envoyé au purgatoire. C’est pourtant dommage. On peut ne pas être en accord avec l’ensemble de ses vues, si foisonnantes et donc si sujettes à controverses (« la technologie est essentielle, on ne peut pas s’y opposer »), il serait ridicule de les rejeter en bloc. Plusieurs ouvrages de ce philosophe norvégien (1912-2009) existent en français. Celui-ci, Vers l’écologie profonde, une réédition augmentée, est en fait une conversation avec David Rothenberg (né en 1962) l’un de ses anciens élèves devenu comparse plus que disciple. « Ce que j’ai voulu donner à voir ici, c’est un Arne Næss non écrit, pas l’analyste méthodique et minutieux dont les raisonnements byzantins demeurent incompréhensibles au profane. » L’interview est bien menée et Rothenberg place quelquefois en porte-à-faux le philosophe, lequel assure vouloir conserver une large part d’ambiguïté dans ses propos : « ...J’ai parfois l’impression », dit l’intervieweur, « depuis le temps que je discute avec toi, qu’il y a de nombreux sujets que tu refuses d’approfondir, des situations dont tu te refuses à voir qu’elles peuvent être complexes et comporter des nuances. » Arne Næss esquive, s’enferre, et, c’est aussi l’intérêt de ce volume, ne livre pas une vérité. Né dans un milieu aisé, il narre ses jeunes années à Oslo, puis en Autriche, à Vienne, où il se lie avec les pionniers de la psychanalyse. Sportif, il pratique l’escalade et découvre ainsi la nature, au point, ensuite, de séjourner longtemps à Tvergastein, dans une maison perdue dans la montagne norvégienne. Il avoue avoir été influencé par Gandhi, par Rachel Carson (1907-1964, biologiste marine américaine, considérée comme la précurseure du mouvement écologiste, initiatrice d’organisations comme Greenpeace ou le WWF) et, doublement, par Spinoza (1632-1677) et par Peter Wessel Zapffe (1899-1990, cf. Le Dernier Messie, Allia, 2023), ce dernier peu connu hors de Norvège bien que s’inscrivant dans le courant de la philosophie existentialiste sombre du milieu du XXe siècle. Ce qui n’empêche pas Arne Næss de déclarer : « Il a eu une grande influence sur moi, mais je n’ai jamais cru en lui. » Trop pessimiste pour lui, peut-être, Zapffe ? Arne Næss ne cesse de questionner et de se questionner. Il peut être sujet à caution. Tenter de le suivre est pourtant stimulant. On peut penser qu’il s’égare lui-même parfois ou qu’il patine, que ses propos sont en-deçà de certaines des réflexions qu’on lui prête ou qu’il énonce deux phrases plus loin. Ainsi, lorsqu’il évoque les années d’occupation nazie en Norvège alors qu’il exerçait à l’université d’Oslo. Engagement auprès de la résistance un peu long à venir peut-être – mais il n’approuva pas Quisling ni les troupes allemandes. « Je ne suis pas assez solide nerveusement pour affronter des problèmes sociaux très graves, où l’on se retrouve plongé dans la tragédie jusqu’au cou. » On peut le rejoindre avec plus d’enthousiasme lorsqu’il fait état de son admiration, plus sans doute que de son amour, pour la nature. L’écologie profonde qu’il professe ne place pas, quoi qu’en disent ses pourfendeurs, la nature au-dessus de l’être humain. Force lui est cependant de constater qu’elle est en opposition avec « l’écologie superficielle », n’en prenant que plus de valeur à mesure que les gouvernements adoptent, tout comme la plupart des grandes sociétés industrielles et commerciales, des mesures de green-washing. Huit points non inexorables ont été actés par Arne Næss pour la définir. Le premier : « Le bien-être et l’épanouissement des formes de vie humaines et non humaines de la Terre ont une valeur en eux-mêmes. » Le sixième : « Les politiques publiques doivent (…) être changées. Ces changements affecteront les structures économiques, technologiques et idéologiques fondamentales. Il en résultera une organisation politique profondément différente de l’organisation politique actuelle. » Autrement dit, Arne Næss défend une conception holistique, qu’il qualifie d’« écosophie » : « l’écologie mélangée à la philosophie, la sagesse en lien avec l’action concernant les personne sur Terre ». Rappelons par ailleurs le beau volume que Mathilde Ramadier lui avait consacré (Arne Næss, pour une écologie joyeuse, Actes sud, 2017). On ne peut bien sûr que recommander la lecture de ce long dialogue entre Arne Næss et David Rothenberg, parfois un peu à couteaux tirés (cf. p. 254 et suivantes, par exemple !) et néanmoins très utile pour la construction d’une pensée écologiste en prise avec la sinistre réalité du monde.
* Arne Næss/David Rothenberg, Vers l’écologie profonde (Is it painful to think ? Conversation with Arne Næss, 1993), trad. de l’anglais Dominique Bellec, avant-propos et postface Baptiste Lanaspeze, préface David Rothenberg, Wildproject, 2023
Éloge de l’obscurité
La nuit existe de moins en moins. C’est le troublant constat que livrent des scientifiques ces dernières années. La pollution par la lumière artificielle empêche le noir de se faire sur la majeure partie des villes et des espaces naturels, gênant la vie de la faune et de la flore. Dans Éloge de l’obscurité, Sigri Sandberg (née en 1975, journaliste) revient sur ce phénomène. Elle qui affirme avoir toujours eu peur du noir le recherche à présent. Plus : elle veut être seule dans le noir et pour cela, s’installe quelques jours dans un chalet, à Finse, près de Voss. « ...Je sais que j’ai besoin de cette solitude. Les années passant, je suis devenue plus sensible aux foules, au bruit, aux diverses ambiances. J’ai besoin de silence. » L’obscurité, la solitude, le silence permettent à l’être humain de distinguer le monde autour de lui, de l’appréhender pleinement. Ils lui redonnent son équilibre, lui sont indispensables pour son bien-être. Convient-il de légiférer pour faire cesser l’éclairage nocturne ? Sigri Sandberg évoque le personnage de Terje Larsen, un vagabond, « le Vagabond », qui a commis des centaines, peut-être des milliers de cambriolages de hytta en Norvège, arrêté, emprisonné, libéré à de multiples reprises, mort à l’âge de soixante ans. La peur du noir, explique-t-elle, c’est avoir peur de voir débarquer un tel individu. Quelque chose d’irrationnel. De très peu probable. L’ouvrage de Sigri Sandberg rebondit d’une pensée à une autre : l’obscurité, la nuit, le sommeil, les rêves... Des choses très personnelles et d’autres bien plus générales. La silhouette de Christiane Ritter est convoquée (cf. Une Femme dans la nuit polaire), puis celle de Jon Fosse. On se laisse prendre au jeu, même si on ne voit pas bien où l’auteure veut emmener le lecteur – et ce n’est pas à cause de la pénombre. À s’interroger, sans doute, sur la beauté des ténèbres... Nyctalopes et autres oiseaux de nuit apprécieront.
* Sigri Sandberg, Éloge de l’obscurité (Mørke. Stjerner, redsel og fem på Finse, 2019), trad. Céline Romand-Monnier, Noir sur blanc, 2021
Insectes : un monde secret
Les toutes, toutes petites bêtes qui vivent auprès de nous sans forcément attirer notre attention revêtent un rôle indispensable pour l’espèce humaine. Ce livre de Anne Sverdrup-Thygeson, Insectes : un monde secret, nous l’explique en nous présentant divers insectes (six pattes, quatre ailes, deux antennes, donc). Tous participent à notre bien-être depuis la nuit des temps et tous, aujourd’hui, sont menacés par nos activités. Pourtant, les insectes nous sont indispensables pour réguler l’agriculture et peut-être leur consommation alimentaire se développera-t-elle, moins polluante que l’élevage de bovins. Une affaire de goût et surtout d’habitudes. Dans cet ouvrage très documenté et qui se lit presque comme un roman d’aventures, l’auteure passe en revue non sans humour les multiples facettes de la collaboration insectes-humains. Jusqu’à la reconnaissance faciale dans les aéroports effectuée, éventuellement, par des abeilles : « Nous pourrions transposer les principes de la reconnaissance de la morphologie faciale par les abeilles dans une logique adaptée aux ordinateurs. » Par exemple. Car l’observation des insectes a beaucoup à nous apprendre dans tous les domaines de la vie. Un peu à l’instar des ouvrages de Peter Wohlleben sur les arbres, ce livre incite le lecteur à ouvrir grands les yeux et à se réjouir de ce foisonnement qu’il ne perçoit pas toujours. Ainsi, dans une forêt, « les arbres morts figurent parmi les éléments les plus vivants que vous pouvez trouver », car habités par des myriades d’insectes et de divers autres animaux, dont les oiseaux. Nous ne sommes pas seuls sur Terre : n’oublions pas, pour commencer, que les insectes sont infiniment plus nombreux que nous et que sans eux, nous ne survivrions pas. « Une baisse du nombre d’insectes et l’éradication de certaines espèces se propagera dans les écosystèmes comme des ronds dans l’eau. » Professeure à l’Université norvégienne pour les sciences de la vie et conseillère scientifique pour l’Institut national norvégien de recherche pour la nature, Anne Sverdrup-Thygeson nous le démontre avec brio.
* Anne Sverdrup-Thygeson, Insectes : un monde secret (Insektenes planet, 2018), trad. Hélène Hervieu & Marc Ythier, Arthaud, 2019
Le Premier mystère
« Nous sommes trois cents millions massés derrière la porte », chantait Ricet Barrier (« Les spermatozoïdes »). Un seul d’entre eux parviendra à destination : la vie. C’est ce périple, entre la conception et la naissance, cette « fabrication de l’être humain », que conte Katharina Vestre dans Le Premier mystère. « En chemin, le spermatozoïde risque d’être englouti par des cellules immunitaires et détruit par le milieu acide. Il pourrait aussi rester coincé dans l’une des profondes cavités du col de l’utérus. La plupart des concurrents sont rapidement éliminés. » Et l’auteure de suivre le spermatozoïde pas à pas, si l’on peut dire, étape par étape, jusqu’à ce qu’un être vivant humain gonfle ses poumons et pousse des pleurs. Ouvrage de simplification, à l’instar de quelques autres publiés ces dernières années, Le Premier mystère donne envie d’en savoir encore plus sur les innombrables mystères qui entourent la vie. Passionnant.
* Katharina Vestre, Le Premier mystère (Det første mysteriet, 2018), ill. Linnea Vestre ; trad. Marina Heide, Flammarion, 2019
Le Dernier Messie
« Une nuit, en des temps immémoriaux, l’humain se réveilla et se vit lui-même. Il vit qu’il était nu sous le cosmos, errant à l’intérieur de son propre corps. » Ainsi commence le court essai de Peter Wessel Zapffe, Le Dernier Messie, publié initialement en 1933 dans la revue norvégienne Janus. Né en 1899 à Tromsø, mort en 1990, le philosophe est donné comme s’inscrivant dans la lignée de l’Allemand Arthur Schopenhauer ; on peut aussi, de nos jours, le rapprocher des penseurs liés au mouvement de la « décroissance ». Considéré comme exagérément pessimiste et fataliste, Peter Wessel Zapffe défend l’idée que l’intelligence de l’être humain s’oppose à ce dont la nature a besoin pour fonctionner. « Une espèce était plus armée qu’il n’eût fallu – l’esprit l’avait rendu non seulement toute puissante sur ce qui l’entourait, mais dangereuse, y compris pour son propre devenir. » Comment ne pas trouver ces paroles affreusement prophétiques, d’autant plus aujourd’hui, alors que le tapis rouge est partout déroulé à une post-humanité bardée d’IA et d’autres gadgets, si l’on peut dire, destructeurs pour l’ensemble de l’humanité ? Peter Wessel Zapffe prône une réduction de la natalité et s’avoue « nihiliste ». En toute logique, il est ami avec le théoricien de l’écologie que fut Arne Næss (1912-2009, fondateur du concept d’« écologie profonde »), tous deux contemporains et passionnés d’alpinisme et d’observation de l’environnement. Ce texte, Le Dernier Messie, a été écrit en 1933, donc bien avant l’ère du numérique (fin du XXe siècle) et avant, également, la prise de conscience que l’utilisation des énergies fossiles (que l’on peut dater des premières machines à vapeur, à la fin du XVIIIe siècle) entraînerait un réchauffement climatique à l’échelle du globe et aux conséquences difficilement imaginables. S’il est donc étonnamment précurseur, il montre aussi que les scientifiques étaient en mesure de comprendre ce qui s’annonçait, cette catastrophe mondiale en cours, et que les politiques pouvaient en être prévenus. (On ne peut qu’être littéralement stupéfait lorsque notre cher président de la République Emmanuel Macron affirme n’avoir découvert que tout récemment l’ampleur du phénomène... ! Est-ce bien la peine de jouir de tellement de pouvoir et des avantages qui lui sont liés et de disposer d’un si confortable salaire, pour ne pas être capable de distinguer ce que des individus de toutes catégories professionnelles et de toutes obédiences politiques pointent depuis longtemps... ?) L’être humain, écrit Peter Wessel Zapffe (et nonobstant l’écart chronologique, il pourrait s’adresser au sus-nommé), « procède (…) à un refoulement plus ou moins conscient de son néfaste excédent de conscience », ajoutant que cela « constitue l’une des conditions de l’adaptation à la société et, d’une manière générale, ce que l’on qualifie couramment de mode de vie sain et normal ». Aïe ! Là est le problème, véritable problème existentiel, que le philosophe cerne avec force. D’aucuns parleraient d’un cerveau surdimensionné pour résoudre les besoins essentiels et néanmoins primaires, comme la nécessité de s’alimenter ou de se reproduire ; ou encore, de soubresauts du cerveau reptilien... Certains présupposés de l’auteur peuvent heurter le lecteur d’aujourd’hui (les différences femmes-hommes, par exemple), mais ils sont à remettre dans le contexte de l’époque et ne nuisent pas à sa pensée générale. Laquelle, s’acoquinant nous semble-t-il plus avec le freudisme, quoi qu’il s’en défende, qu’avec le marxisme en vigueur dans une bonne partie de l’Europe d’alors, un peu, un tout petit peu à la façon d’un Erich Fromm (Avoir ou être ?), reste remarquablement prémonitoire. Sans entrer en contradiction avec les propos énoncés auparavant, Peter Wessel Zapffe affirme enfin que « la valeur globale d’un progrès technique du point de vue du mode de vie doit se mesurer aux possibilités qu’il fournit aux humains de faire fonctionner leur intellect ». Et ainsi, privilégiant l’humanisme (au sens de prépondérance de l’individu non pas sur les autres ni sur la nature mais sur lui-même, à la Stirner), plus que la technologie, le bien-être plus que la possession de biens, le progrès redeviendrait une valeur en soi. « Connais-toi toi-même – soyez inféconds et laissez derrière vous la terre en paix. »
* Peter Wessel Zapffe, Le Dernier Messie (Den sidste Messias, 1933), trad. du norvégien Françoise Heide, Allia, 2023
La Femme et les champignons
« Malgré leurs efforts répétés, les entreprises commerciales n’ont toujours pas réussi à cultiver les champignons les plus recherchés. (…) Les champignons ont un côté aléatoire, sauvage », explique Long Litt Woon en préambule du remarquable essai qu’elle consacre à la mycologie, La Femme et les champignons. Quand Eiolf, son mari, décède, Long Litt Woon (née en 1958 en Malaisie) est abattue de chagrin. « ...Le premier Norvégien que je rencontrais qui savait situer la Malaisie, sans avoir à regarder dans un dictionnaire. » C’est un peu par hasard qu’elle décide d’assister à une réunion de « l’association d’Oslo et de ses environs pour les champignons et les plantes utiles ». Le nom de l’association est désuet, affirme l’auteure, mais, à l’intérieur, figurent des individus représentant toutes les couches de la société norvégienne, ce qu’elle juge sympathique. Ensemble, ils vont apprendre à distinguer les multiples sortes de champignons. Le règne des fungi, découvre-t-elle, avant de se faire très pédagogue, se situe entre celui du végétal et celui de l’animal. « Les champignons que j’ai appris à connaître ont été de petites aires de repos qui m’ont apporté substance et tranquillité, avant de m’envoyer vers l’étape suivante dans un long voyage de découverte intérieure. (…) Les champignons m’ont apporté des perspectives inédites, y compris dans la construction d’une nouvelle signification de ma vie. » Dans ce livre qui peut se lire comme un guide (champignons comestibles, vénéneux, hallucinogènes), Long Litt Woon montre comment sont perçus les champignons. Il y a les « mycophobes » et les « mycophiles ». Exemple édifiant, qui peut être extrapolé : « Des générations de préjugés, d’ignorance et de manque de curiosité ont façonné des sentiments aussi forts qu’irrationnels... » Après la publication de L’Homme et le bois de Lars Mytting (2017), La Femme et les champignons, livre non moins original (le texte est imprimé en deux tons : l’un quand l’auteure évoque Eiolf, l’autre quand elle s’en tient à ses découvertes mycologiques) ravira les gourmands et les écologistes : quand un individu explique comment il en est venu à cultiver (terme adéquat) une passion directement puisée dans le riche milieu naturel. Un livre pas évident, qui honore le catalogue Gaïa.
* Long Litt Woon, La Femme et les champignons (Stien tilbake til livet. Om sopp og sorg, 2017), trad. Alex Fouillet, Gaïa, 2018