Beaux Livres
Islande, souffles de vie
Les paysages islandais se prêtent à la photographie : ce livre,Islande, souffles de vie, signé Philippe Garcia et Fabien Zunino, le confirme une fois de plus. D’autant que les deux photographes ont veillé à ne pas altérer le milieu naturel lors de leurs prises de vue, comme précisé à la fin de l’ouvrage. Aucun appât, par exemple, pour attirer les animaux sauvages. Autrement dit, juste de la patience et de la pertinence. Le résultat est un magnifique ouvrage, présentant des photographies plutôt animalières de l’Islande ; les paysages sont connus, il est vrai, tandis que cet aspect, la faune sauvage de l’île, si foisonnante et pourtant plus difficile à appréhender, surprendra ceux qui croient connaître ce bout du monde. « Dans ce monde minéral, la vie n’est pas en reste. L’Islande est avant tout une terre d’accueil pour la nidification de nombreux oiseaux qui trouvent dans ses eaux poissonneuses des conditions idéales pour leur reproduction. Les oiseaux et le vent ont ainsi importé la flore et les invertébrés. » Que de beauté, chez ces animaux ! Remarquons enfin que le prix de ce livre (29 euros) est modique, eu égard à sa qualité.
* Philippe Garcia & Fabien Zunino, Islande, souffles de vie (préf. Kristján Andri Stefánsson, ambassadeur d’Islande en France), Omnisciences (Nunataks), 2018
Les Deux saisons de l’Islande
Les beaux livres sur l’Islande se succèdent, mais il est rare que l’un d’entre eux suscite à ce point l’envie de s’y rendre au plus vite. « L’Islande n’est pas seulement un pays, pas seulement un territoire, pas seulement une île, l’Islande est un univers à part entière », précise d’emblée Arnaud Guérin dans Les Deux saisons de l’Islande. Le photographe n’en est certes pas à son coup d’essai, on lui doit plusieurs guides et beaux livres consacrés à cette terre de « lave et de glace » et à d’autres régions du monde. Sous-titré « Du soleil de minuit aux aurores boréales », celui-ci montre que sur cette île de l’Atlantique nord, il n’y a qu’un long hiver et un court été. Deux saisons très contrastées qui permettent à la nature de se révéler, toujours étonnante, toujours foisonnante, toujours majestueuse. « Les lumières y mettent en scène des paysages dignes des premiers matins telluriques du monde. » Paysages minéraux, peut-on penser, avant d’observer l’omniprésence de la mousse, des mousses plutôt tant leurs variétés sautent aux yeux, et des lichens et des « arbres de taille lilliputienne » ; et la présence d’une faune abondante : lagopèdes alpins, rennes, faucons gerfauts, goélands, moutons, poneys... « L’Islande est une terre naturellement déraisonnable, qui ne peut vous laisser indifférent tant elle chamboule tous vos repères, vous mettant souvent dans un état émotionnel proche de la sidération. » Amoureux de son sujet, Arnaud Guérin l’est assurément, et ses photographies le reflètent. Difficile de refermer ce livre... !
* Arnaud Guérin, Les Deux saisons de l’Islande, Glénat, 2019
Quatre saisons en Islande
Faute de pouvoir s’offrir un voyage sur l’île de l’Atlantique nord, la réédition de ce volume de photographies d’Olivier Joly, Quatre saisons en Islande, procurera déjà l’impression de humer le vent marin au cœur de la lande volcanique. Les photographies réunies ici sont d’une beauté remarquable. Elles « vous convaincront peut-être que les charmes de l’Islande se dévoilent partout, même loin de Blue Lagoon et du Cercle d’or. Dans un champ de lave en apparence anodin, sur un petit coin de mousse qu’il ne faut surtout pas piétiner. En surplomb d’un fjord. Dans les bains naturels d’une vallée éloignée. » Olivier Joly montre les beautés de la nature dans des lieux jusqu’à récemment préservés des assauts des industriels et des touristes. Il sait aussi, à l’occasion, introduire des notes contemporaines pour produire des effets d’humour – comme ce camion dont les flancs arborent une publicité tout en couleur pour des légumes produits dans les serres islandaises qui fonctionnent grâce à la géo-thermie. Paysages démesurés, visages humains marqués par une nature ici si prégnante ou « larmes de gel » sous l’œil d’un cheval, l’émotion sourd de chacune de ces photographies. Diplômé de l’École de journalisme de Lille, Olivier Joly a été journaliste au Journal du dimanche, avant de publier des photographies dans divers titres (Géo, Le Monde, etc.). L’Islande est sa « terre promise » est-il écrit quelque part dans ce superbe livre. On n’en est pas surpris.
* Olivier Joly, Quatre saisons en Islande, Favre, 2019
Loneliness
Voici ce qu’on appelle un beau livre : Loneliness. Des photographies signées Étienne Ketelslegers, de maisons abandonnées en Islande. Pas de texte, sinon une préface de Bergdís Ellertsdóttir, ambassadrice d’Islande à Bruxelles, qui relève que des familles ont vécu dans ces lieux dispersés sur toute l’île. Des existences anonymes pour les uns, de véritables sagas pour les autres. « Il est manifeste que ces endroits ont représenté – à un moment – le centre de gravité et le point d’ancrage d’une cellule familiale. Un refuge dans une nature souvent hostile ». Le regard d’Étienne Ketelslegers met en perspective ces bâtisses : à quelques mètres de la mer, au pied d’une montagne noire, au milieu d’un champ de lave ou entourées par la neige. Avec la surprise de découvrir des objets hétéroclites, la carcasse d’un navire rouillé, d’une voiture désossée, ou encore la carlingue d’un avion qui ne volera plus jamais. La confrontation avec la nudité de la nature, en arrière-plan, si crue, attribue à ces bâtisse un caractère singulier. Chacune d’entre elles acquiert une personnalité. Paradoxalement, c’est parce qu’elles sont photographiées ainsi, comme des maisons abandonnées de longue date, qu’elles se remplissent de vie et que leurs anciens habitants semblent se tenir sur le seuil et, porte ouverte, nous inviter à les visiter. Un très beau livre dont chaque photographie nous raconte une histoire intime.
* Étienne Ketelslegers, Loneliness, Husson, 2017